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Réglage

La Cour des comptes considère que les finances publiques françaises sont dans une situation inquiétante

Paris, 15 juillet, AZERTAC

Dans un rapport, la Cour des comptes critique sévèrement les prévisions à moyen terme du gouvernement Attal, dénonçant des « objectifs peu réalistes » basés sur des hypothèses de croissance « trop optimistes ». Après « une très mauvaise année » 2023, les finances publiques françaises se trouvent dans « une situation inquiétante » et la trajectoire définie par le gouvernement sortant pour les redresser d’ici 2027 repose sur des « objectifs peu réalistes », avertit la Cour des comptes le lundi 15 juillet.
Dans un rapport détaillé, présenté lundi matin, les magistrats financiers dressent un constat préoccupant des comptes publics, fragilisés par les crises sanitaire et inflationniste et susceptibles de souffrir de l’incertitude post-législatives. Ils critiquent aussi sévèrement les prévisions à moyen terme du gouvernement Attal, détaillées en avril à la Commission européenne dans le programme de stabilité (PSTAB) : il prévoit un retour en 2027 sous les 3 % du PIB pour le déficit public, malgré une dégradation à 5,5 % en 2023 (au lieu des 4,9 % anticipés). Ce document vise un déficit de 5,1 % en 2024, diminuant progressivement à 2,9 % en 2027. La dette publique atteindrait 112 % du PIB en 2027, soit plus qu’en 2023 (109,9 % selon l’Insee).
« Cette trajectoire, peu ambitieuse dans ses objectifs de déficit et de dette, (…), pose une question de crédibilité », écrit la Cour des comptes, sans préjuger de la construction du budget 2025 par le futur gouvernement. Ces « objectifs peu réalistes » reposent sur des hypothèses de croissance « trop optimistes » et supposent des économies budgétaires « sans précédent » ainsi que « des augmentations significatives des prélèvements obligatoires qui ne sont pas précisées », souligne-t-elle.
Par ailleurs, les prévisions gouvernementales à moyen terme n’intègrent « pas pleinement » les enjeux liés au réchauffement climatique et à la transition énergétique. « Or, que ce soit en termes de croissance, d’investissements ou d’érosion de la fiscalité, cette transition a un coût qui pèsera nécessairement sur les finances publiques », relève la Cour.
Dès 2024, des « risques importants » menacent la réalisation de ces objectifs, notamment un possible dérapage des dépenses, alors que la crise des agriculteurs, celle en Nouvelle-Calédonie ou l’organisation des Jeux olympiques ont nécessité des dépenses supplémentaires. Pour 2024, l’Insee anticipe une croissance du PIB de 1,1 %, légèrement supérieure à la prévision du gouvernement (1 %). À ce stade, le gouvernement prévoit 25 milliards d’économies cette année, et d’autres en 2025. La Cour pointe également les incertitudes autour du projet de taxe sur les rentes, censé rapporter 3 milliards d’euros.
« Cette situation française contraste avec celle de nos partenaires européens, qui ont commencé à réduire leurs déficits et leurs dettes. Ce n’est ni satisfaisant ni acceptable », critique Pierre Moscovici dans un entretien aux Echos. La deuxième économie de la zone euro a été épinglée par la Commission européenne pour déficit excessif – la procédure devrait être formellement ouverte cette semaine – et pourrait subir une nouvelle dégradation de sa note souveraine par une agence de notation, après celle décidée par Standard & Poor’s fin mai.
En conclusion, le rapport estime « indispensable d’engager résolument l’effort de réduction du déficit public pour replacer la dette sur une trajectoire descendante », d’autant plus que le coût de la dette va augmenter, pour atteindre 72,3 milliards d’euros en 2027, selon les prévisions du gouvernement, soit plus que le budget de l’Éducation nationale. « Réduire notre dette est une ardente obligation », quel que soit le gouvernement qui sera finalement formé après les élections législatives anticipées, affirme le premier président de la Cour des comptes aux Echos. « Il y a plusieurs façons d’y parvenir, c’est la démocratie, mais cet impératif doit être partagé », insiste-t-il.
Dans une réponse annexée au rapport, le ministère de l’Économie et des Finances conteste certaines conclusions. Il rappelle avoir beaucoup dépensé pour protéger les ménages et les entreprises des crises récentes, sans quoi « la France n’aurait pas été parmi les premiers pays européens à retrouver un niveau de PIB antérieur à la crise du Covid ». « La crédibilité de notre gestion budgétaire est attestée par le maintien de la notation française par la majorité des agences de notation (…) et par la stabilité » de l’écart de taux d’intérêt d’emprunt avec l’Allemagne « jusqu’à l’annonce récente de la dissolution de l’Assemblée nationale », ajoute-t-il.

Monde 2024-07-15 18:22:00